Sport Spiel |
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Tuesday, February 08, 2005
Merci, Baptiste...
On est toujours contemporain d’un futur artiste maudit : voici l’occasion d’en célébrer un tant qu’il est temps. A la faveur de cet été 2020, votre ex-magazine préféré propose un hors série, Les Génies Méconnus du Rock, Volume 12. Un dénommé Mike « Sport » Murphy figure en bonne place dans ce classement de déclassés de l’Histoire, une poignée de disques à son actif, puis plus rien : écœuré par l’indifférence, un peu las de rejouer ce rôle usant de Don Quichotte, il s’est retiré, en silence. Il y est dit, dans cet éloge tardif, que cet homme écrivait des chansons, pas n’importe quelles chansons, non : des chansons qui prennent des libertés et la tangente si ça leur chante ; des chansons où l’on entend une voix singulière s’exprimer ; des chansons, enfin, que l’on aurait bien voulu écrire, dans une autre vie - si la musique nous avait aimé autant que nous l’aimions.Dès les premières lignes, les remords vous prennent à la gorge - qu’écoutiez-vous donc de si important, alors, pour l’avoir ignoré ? Cet article dirait comment le chant évoquait Richard Thompson ou un Tom Waits dont le gosier n’aurait pas charrié de graviers ; il dirait aussi combien ces mélodies rares, au lyrisme secret, sans emphase, vous saisissaient le cœur ; il se pencherait aussi sur l’intelligence des arrangements, dessinant une trame délicate, peut-être savante (des noms seraient jetés en pâture : Brian Wilson, Van Dyke Parks, Randy Newman), assurément vouée à éclairer l’âme de ces musiques, comme un khôl économe fait ressortir l’éclat d’un regard. Il serait question de Magic Beans, album magique, presque enfantin (versant Peter Pan), ses comptines poivrées, du genre que l’on chantonne par devers soi, après le dernier verre, mis à la porte du dernier bar qui voulait encore de vous.On y entend des valses, du punk, de l’appeau et des guitares, binaires si elles veulent, titubantes si elles veulent aussi, des ballades de jeune homme triste, des odes de jeune homme amoureux. De la variété alors ? Si l’on veut, si l’on s’en tient au sens littéral - variété : tout ce que la musique peut. Des paroles qui disent à traits délicats, pointillistes, l’étrange expérience de la vie : elles ne dédaignent pas le surréalisme et ne refusent pas le prosaïsme. Le journaliste expliquerait aussi comment la passion des sons, sans frontières, ni de contraignante conscience de genres, court à travers son œuvre, nourrissant des chansons écrites comme si l’industrie de la musique n’avait jamais existé. Cet article reviendrait sur Uncle, ce disque qui n’aurait pas vu le jour - et nous qui n’aurions alors pas vu la lumière - si ce jour de septembre 2001, le neveu de son auteur, avec qui il avait été élevé en frère, n’était pas mort, pompier un jour de cendres. De la douleur, et du besoin de célébrer l’esprit d’un être aimé, sont nées ces chansons de colère et d’amour, où chaque mot de rage et tristesse, chaque note, composent une brassée de souvenirs offerts. Sur le livret, en guise de déclaration politique, ces mots : "Fuck this world". Nous sommes en 2005, il n’est pas trop tard pour découvrir cet homme, trouver dans ses créations de quoi alimenter cœur, corps et esprit, pour se rappeler pourquoi la musique compte à ce point, au quotidien et pourquoi elle nous regarde et nous parle. S’il est bon (parfois, par instinct, ou pause) d’être dans la marge, il arrive que l’on rêve d’avoir raison à plusieurs - et jouir d’être dans la majorité. Mike Sport Murphy est le genre de type qui vous donne envie de rencontrer une héritière (ou, à défaut, un capitaine d’industrie), disposée à financer vos fantaisies : fonder un label digne de ce nom pour l’exposer comme il le mérite, louer l’Olympia pour l’y accueillir, acheter des pages dans les quotidiens nationaux pour vanter ses mérites - voire, acquérir RTL pour diffuser exclusivement sa musique. J’ai eu la chance de rencontrer Sport Murphy l’été dernier, dans un des derniers bars hospitaliers de Manhattan (c’est-à-dire où l’on puisse fumer en paix). Il s’est montré à la hauteur : chaleureux, humain, drôle, parlant aussi bien de Leonard Cohen et de bourbon que de son goût pour Sinatra (pour tout vous dire, au risque de compromettre ma réputation, le barman a dû, à son corps défendant, nous entendre passer en revue quelques standards de Old Blue Eyes- qu’il accepte mes excuses s’il me lit). Il mettait aussi en avant l’avantage de combiner l’ébriété (si possible induite par l’absorption d’absinthe) et l’écoute d’Âme câline de Polnareff - je ne peux détailler ici en quoi consiste précisément cet avantage, pour des raisons évidentes, je me souviens en revanche avoir été convaincu. Bref, pour le dire simplement : Sport Murphy est un type bien, à tous égards. Merci de ne pas avoir à vous souvenir trop tard. here
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